Prologue A Ludovic Halevy Mon cher maitre, Permettez-moi de vous presenter madame Manchaballe, tres proche parente assurement de votre ancienne amie, madame Cardinal. Qui sait, une de ses filles, peut-etre, Pauline ou Virginie? En effet, vous nous avez conte l'histoire des Petites Cardinal, alors que j'envoyais a notre pauvre ami Marcelin, pour la Vie Parisienne, mes premiers essais litteraires de sous-lieutenant alors que MM. de Saint-Pierre, Davilliers, de Caux, Massa, Magnan, de Varannes, etc., faisaient les beaux jours de l'Opera de la rue Le Peletier. Evidemment, c'etait moins grand, moins luxueux, moins eclaire qu'aujourd'hui, mais c'etait plus chaud, plus capitonne, avec un tas de petits coins propices aux douces causeries. Au lieu de monter comme maintenant au foyer de la danse, on y descendait par quelques marches toujours encombrees par les coryphees. C'etait le quartier general des Fiocre, des Villeroy, des Trois Valets, des Volta, des Leontine Rousseau... et des petites Cardinal. Ou sont les neiges d'antan! Le foyer n'est plus tout a fait ce qu'il etait alors, malgre les seductions de mesdames Chabot, Invernizzi, Torri, Tremblay, Violat, Lecouvey, Roumier, et toujours des meres de danseuses, et madame Cardinal a certainement passe son cabas et son parapluie a madame Manchaballe. Aujourd'hui, mon cher maitre, devenu immortel, vous sacrifiez a des dieux plus serieux, et, en dehors des premieres, l'on ne vous apercoit plus guere dans les coulisses de l'Opera; mais si vous y veniez quelque soir, je suis sur que vous eprouveriez le meme plaisir que jadis a ecouter les petits potins de ces dames, les aventures de Judith, de Rebecca, de Caroline Manchaballe, de ces nouvelles qui sont entrees dans la carriere quand leurs anciennes n'y etaient plus, et qui y ont trouve, avec leur poussiere, sinon les traces de leurs vertus, du moins les souvenirs de votre esprit. Permettez-moi donc de vous dedier tres humblement ce petit livre qui vous revient de droit, et pour que madame Manchaballe soit aussi joyeuse qu'aimable, Nous vous prions d'en etre le parrain. Veuillez agreer mon cher maitre, la nouvelle assurance de ma bien sincere admiration et de ma profonde sympathie. Richard O'Monroy. 1er Aout 1892
Show morePrologue A Ludovic Halevy Mon cher maitre, Permettez-moi de vous presenter madame Manchaballe, tres proche parente assurement de votre ancienne amie, madame Cardinal. Qui sait, une de ses filles, peut-etre, Pauline ou Virginie? En effet, vous nous avez conte l'histoire des Petites Cardinal, alors que j'envoyais a notre pauvre ami Marcelin, pour la Vie Parisienne, mes premiers essais litteraires de sous-lieutenant alors que MM. de Saint-Pierre, Davilliers, de Caux, Massa, Magnan, de Varannes, etc., faisaient les beaux jours de l'Opera de la rue Le Peletier. Evidemment, c'etait moins grand, moins luxueux, moins eclaire qu'aujourd'hui, mais c'etait plus chaud, plus capitonne, avec un tas de petits coins propices aux douces causeries. Au lieu de monter comme maintenant au foyer de la danse, on y descendait par quelques marches toujours encombrees par les coryphees. C'etait le quartier general des Fiocre, des Villeroy, des Trois Valets, des Volta, des Leontine Rousseau... et des petites Cardinal. Ou sont les neiges d'antan! Le foyer n'est plus tout a fait ce qu'il etait alors, malgre les seductions de mesdames Chabot, Invernizzi, Torri, Tremblay, Violat, Lecouvey, Roumier, et toujours des meres de danseuses, et madame Cardinal a certainement passe son cabas et son parapluie a madame Manchaballe. Aujourd'hui, mon cher maitre, devenu immortel, vous sacrifiez a des dieux plus serieux, et, en dehors des premieres, l'on ne vous apercoit plus guere dans les coulisses de l'Opera; mais si vous y veniez quelque soir, je suis sur que vous eprouveriez le meme plaisir que jadis a ecouter les petits potins de ces dames, les aventures de Judith, de Rebecca, de Caroline Manchaballe, de ces nouvelles qui sont entrees dans la carriere quand leurs anciennes n'y etaient plus, et qui y ont trouve, avec leur poussiere, sinon les traces de leurs vertus, du moins les souvenirs de votre esprit. Permettez-moi donc de vous dedier tres humblement ce petit livre qui vous revient de droit, et pour que madame Manchaballe soit aussi joyeuse qu'aimable, Nous vous prions d'en etre le parrain. Veuillez agreer mon cher maitre, la nouvelle assurance de ma bien sincere admiration et de ma profonde sympathie. Richard O'Monroy. 1er Aout 1892
Show moreRichard de L'Isle de Falcon de Saint-Geniès, dit Richard O'Monroy, né en 1849 à Paris où il est mort en 1916, est un romancier et nouvelliste français. Avec Gyp et Ludovic Halévy, il est l'un des conteurs de la vie parisienne dans le dernier quart du XIXe siècle. Sorti de l'école de Saint-Cyr en 1870, il est capitaine de cavalerie lorsqu'il est acculé à la démission en 1891, ce qui lui permet de se consacrer pleinement à l'écriture. Il contribue à La Vie parisienne et au Gil Blas des saynètes de la vie d'officier, des croquis parisiens, des romans et des nouvelles réunis par la suite en une cinquantaine de volumes. Il est également l'auteur de quelques vaudevilles et comédies en un acte. Son style d'allure vive et sa gaieté sentimentale ont su plaire pendant un temps à un certain public.
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